Le rachat d'UGC par Bolloré : Nouvel espoir ou risque pour le cinéma français ?

Ce mardi 2 septembre le groupe Canal + a annoncé le début des négociations pour un potentiel rachat de la chaîne de cinéma UGC. Cette annonce bouscule le monde du cinéma tant elle intervient dans un contexte difficile pour les salles de cinéma qui, on le sait, peinent à attirer leur public notamment depuis la pandémie du Covid-19. L’année 2025 marque cette baisse de fréquentation comme le recense le CNC au mois de juin 2025 : 10,85 millions d’entrées contre 14,14 millions en juin 2024 soit un déclin de plus de 23% par rapport à l’année précédente. Cette désertion des salles de cinéma s’accompagne également de l’essor des plateformes de streaming, de VOD ou encore du prix des billets qui freinent d’autant plus le public. Le cinéma français se trouve donc en position de faiblesse et réclame des solutions pour sauver leur secteur d’activité.
Appartenir au groupe Canal + est il la solution divine ? La question divise. D’un côté le bien fait économique de ce rachat permettrait à UGC de sortir la tête de l’eau. Toutefois les conséquences culturelles de cette décision doivent être soulevées pour comprendre pourquoi ces négociations sont importantes pour l’avenir du cinéma français.
Canal + garant d’une nouvelle sécurité économique pour UGC
Rappelons que l’entreprise UGC possède le troisième plus grand réseau de cinéma en France ce qui représente près de 50 cinémas et qu’elle est l’une des plus grandes entreprises cinématographiques. L’enseigne est présente dans la distribution mais aussi dans la production de nombreux films. Notamment derrière l’entreprise Pathé, récemment rachetée par le milliardaire Rodolphe Saadé, UGC se doit donc de peser parmi la concurrence afin de ne pas se mettre en péril et d'entraîner dans sa chute ses salles, des emplois, ou encore de nombreux producteurs cinématographiques.
Dès lors, la prise de participation de 34% par le groupe Canal + avant un éventuel rachat complet de l’entreprise UGC d’ici 2028 lui permettrait de bénéficier du catalogue de Canal + qui pourrait être profitable aux producteurs de films français. En effet, Canal + est aujourd'hui l’un des plus grands acteurs du cinéma et du divertissement. Par ailleurs, son studio de production et de distribution est le premier studio de cinéma et de télévision européen. Quoi de mieux pour séduire les producteurs français ? Cela apparaît effectivement comme une proposition alléchante qui mettrait UGC sur le devant de la scène en le rendant d’autant plus attractif en France mais aussi à l’international.
Ces négociations semblent donc redonner de l’espoir à une partie du cinéma français car l’investissement d’un milliardaire dans ce domaine peut être perçu comme gage de confiance économique pour le secteur. Les cinémas trouvent donc à travers cette solution une main à saisir.
Il n'empêche que ce scénario mérite d'être nuancé notamment au sujet de ses conséquences culturelles.
Un achat risqué pour le monde du cinéma français
La satisfaction de ces négociations ressentie par le cinéma français demeure toutefois nuancée. En effet, la crainte majeure reste celle d’une baisse de diversité dans les films produits et distribués par la chaîne UGC. Cette concentration de pouvoir à toutes les échelles de production de films peut, in fine, rendre difficile pour les plus petits producteurs, souvent indépendants, de voir leur film apparaître sur grand écran. L’entreprise pourrait miser sur les films à succès avec des budgets importants laissant ainsi de côté des films à moindre coûts qui enregistrent moins d’entrées en salle.
Autre crainte, celle d’une mise à mal de la concurrence. Ce rachat permettrait à l’entreprise Canal + de concentrer toutes les étapes de production sous son aile. Canal + associé à UGC rendrait donc la concurrence extrêmement difficile voire impossible puisque les deux entreprises seraient en mesure d’écraser leurs concurrents. Les autres entreprises comme Pathé par exemple redoutent donc cette éventualité. Ainsi ce pourrait être encore une fois la diversité qui en serait impactée.
Par ailleurs, il semble important de soulever les risques de dérives idéologiques de ce rachat. Les positions politiques (extrême droite) de Vincent Bolloré sont bien connues. Ainsi, il ne semble pas impossible d’imaginer que certains films ne soient plus privilégiés dans le catalogue de production et de distribution de l’entreprise du milliardaire.
Plus simplement, le fait qu’une des plus grande partie du secteur culturel français soit détenu par une même personne aux tendances politiques quelque peu douteuses peut questionner l’avenir du cinéma dans sa diversité, sa liberté ou dans ses thèmes abordés.
Elisa BERHAULT
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